Décadence du système éducatif guinéen: notre école est malade, mais elle reste notre miroir !

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Les résultats du Baccalauréat sont  tombés un mercredi du 26 juillet 2017. C’etait incroyable, c’etait  stupéfiant, mais c’est pourtant la vérité, la réalité qui reflète la décadence et la déliquescence de notre système éducatif, notre corps défendant. Cette décadence qui a commencé depuis une trentaine d’années au vu et su de tout le monde, sans la moindre réaction, sans le moindre mea-culpa. Et personne n’a pu voir ça, ni le crétin, ni le leader visionnaire. Pourtant, ils ont été et sont encore nombreux, ces grands visionnaires qui ont tout vu sauf cette tempête qui est venue pour détruire les cases, les bureaux, les hémicycles et les palais cossus. Et surtout ce qui est le Socle le plus sacré de toute communauté, de toute société. Socle sans lequel il n’y a ni présent, ni futur. C’est-à-dire la relève, les ressources humaines.
Avons-nous préparé notre propre poison, comme l’a dit l’autre, ou serions-nous frappés par cette autre malédiction, après nous, le déluge !
Oui, notre école est malade, mais nous sommes la cause de son endémie.
De belles voitures, de grosses cylindrées, de gros buildings, des cérémonies de gros billets de banque, des domaines qui n’en disent pas mot, la liste est bien longue, et les notaires et autres auditeurs n’en finiront pas vite.
Tout ceci face à des classes d’école de cent élèves, des écoles sans le minimum de commodité liminaire, eau, latrines, bibliothèques, sans terrains de sport et de divertissement, et quoi d’autre encore ?
Aussi, des maîtres et enseignants qui manquent, ou qui n’en sont pas, des titulaires de licences pour former des candidats à la licence, même chose pour les maitrisards. Des programmes scolaires sans cours d’éducation civique et morale. Des cours d’écoles et des campus, devenus des centres de recrutement des marcheurs de rues, des acteurs de sit-in, des lieux de violences. Des écoles devenues maquis et lieux de culte de travers sociaux.
Dans les familles, des salons feutrés avec des écrans plats HD, connectés à toutes les chaînes de télé, les plus prisées, des logiciels de jeux de dernières générations, et jamais de contrôles des leçons, des devoirs de maisons de leurs enfants. Et les cahiers de liaison avec l’école, si ceci existe encore. La liste est longue…
L’indispensable cordon entre l’école et les familles est brisé, ou sinon, est sérieusement affecté.
Des cours, des contrôles et des examens qui se monnaient parfois aux petits et gros sous. Excusez-moi du peu et chacun peut prendre son compteur…
En Europe, aux Etats-Unis ainsi que dans certains pays Africains, un taux d’admission de 30% au bac aurait mis la société en émoi et la gouvernance scolaire sur la braise. Mais en guinée, depuis plus de trente ans la moitié ou les deux –tiers des candidats au précieux sésame sont recalés. Impunément pour les dirigeants de l’école, sans conséquence pour le gouvernement, dans l’indifférence générale des familles, et le silence tombal des parents d’élèves.
Et bien entendu, sans un deuil chez les candidats eux-mêmes dont plusieurs oublieront ou noieront leur chagrin dans des verres de boissons alcoolisées ou d’un joint dans des maquis ou endroits élus. Or elles sont connues, les conséquences de taux d’échecs aussi élevés et récurrents pour un pays comme le nôtre.
Ceci marque le désaccord entre l’état et la société d’une part, l’école et la famille d’autre part. Un mal endémique, que si l’on n’y apporte pas maintenant et sans répit, le médecin, les médicaments et soins appropriés qu’il faut, la mort est irréversible. Et l’avenir proche et lointain du pays, sans excès, est dangereusement compromis.
Cette rupture n’épargnera personne, si malin soit !
Même si les causes sont profondes et nombreuses, il convient de noter les plus importantes et y prescrire sans délais, les remèdes conséquents.
Premier cauchemar : la gestion des flux. Parce que aucun maître, si excellent soit-il ne peut manager une classe de cent élèves.
Aucun pays, si motivé soit-il ne peut gagner la rude bataille de la concurrence qu’entraine la mondialisation, avec des élèves dont la formation de base est si dramatiquement lacunaire.
Peu importe que plus tard, ils décrochent un master ou un doctorat, ils iront à la compétition sans être sûrs de pouvoir utiliser correctement l’auxiliaire avoir ou être. Ils y iront avec le handicap d’une seconde langue internationale. Ils y iront escomptant sur le coup de fil de papa au panel du recrutement, en tout cas pour ceux d’entre eux qui doivent leurs réussites à la poche de leurs parents et à la vénalité d’une administration scolaire dont nous étions si fiers, voici seulement une quarantaine d’années.
Il y a quarante ans, nos lycéens parlaient de Karl Marx, de Honoré de Balzac, de William Eliot, Montaigne, Diderot, Lénine, Jean Jacques Rousseau, Voltaire, Thales, Socrate etc. Aujourd’hui, les campus sont devenus des champs d’affrontements violents, que de centres d’échanges scientifiques.
Enfin, il y a quelques années, l’Etat dépensait quelques millions pour les écoles privées par an. De nos jours, il en est à des milliards. Pourquoi ?
Simple choix stratégique pour le partenariat public- privé ? Révélateur d’une crise systémique plus profonde ? Ou tactique, là où il ne le faut pas, des vases communicants ?
En tout cas, il est impossible d’en douter : Notre école est malade, de trop de maux et de tous les côtés. Les symptômes sont multiples et ne peuvent tous être abordés. Mais le mal dont elle souffre s’appelle Perversion. Le mal de notre société. L’Etat se pervertit. L’éthique et la morale se pervertissent.
 Les gardiens sont devenus les voleurs, les boucliers des passoires, les garde-fous autant de ravins et toutes les solutions quasiment des problèmes.
L’école, n’est, alors, que le reflet de notre société. Et nous sommes nombreux à pouvoir être admis, sans examen clinique poussé, en réanimation…morale.
C’est pourquoi, il faut une prise de conscience de tous, car chacun de nous a sa part de responsabilité. L’Etat, les parents, les enseignants.
L’Etat pour assumer ses obligations régaliennes pour la parfaite réussite du système éducatif guinéen, à travers la mise en œuvre des réformes indispensables.
Les parents à qui incombe en premier lieu, l’éducation morale et civique de leurs enfants, ainsi que le suivi régulier et constant à domicile des enseignements reçus à l’école.
Les enseignants, acteurs importants de cette chaine, doivent être à la dimension de leur noble mission, mission sacrée. Celle de bâtir le socle de toute une Nation. Ceci doit obligatoirement répondre aux critères de compétence, de rigueur et d’intégrité morale sans faille. Autre devoir de l’état dans le recrutement des enseignants tant dans le secteur public que privé.
Enfin, il doit exister une synergie efficace de concertation et d’échanges entre tous les acteurs du système scolaire.
Ainsi, voici les différents maillons de cette chaine de notre société, qui doivent restés en parfaite harmonie pour le salut de la République.
Que cela soit !
Bokar SIDIBE
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